À La Rochelle et dans sa région, la tradition viticole remonte au moins au Moyen Âge. Depuis quelques années, la production de vin retrouve des couleurs : les raisins ne sont plus seulement destinés à la distillation et à la fabrication du cognac. À quelques kilomètres de la cité maritime, sur les îles ou dans l’intérieur des terres, des domaines prometteurs attendent les curieux et les amateurs de vins originaux, déployant une intéressante offre œnotouristique.
Un peu d'histoire
En Charentes et notamment du côté de la Saintonge, on fait du vin depuis l’époque gallo-romaine. Mais c’est au Moyen Âge que la viticulture connaît un formidable essor, quand les grandes abbayes se mettent à planter d’importants vignobles. Sous le règne d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II Plantagenêt, les vins d’Aunis et de Saintonge commencent à s’exporter vers l’Angleterre et l’Europe du Nord, via les ports du littoral charentais. Le fleuve Charente est alors sillonné par les gabares, qui acheminent le vin vers l’océan.
Les vignobles charentais
Le saviez-vous ? Avec près de 80 000 hectares de vignes, le vignoble charentais est l’un des plus importants de France. Si la plupart des pieds servent à fabriquer du cognac (et du pineau), la production de vin est en hausse. L’IGP vins charentais, qui recouvre la majeure partie de la Charente-Maritime et de la Charente, concerne près de 600 vignerons. Dans l’appellation, on compte 90 caves particulières, 3 coopératives et 10 négociants qui se partagent 1 500 hectares de vignoble. Chaque année, de 70 000 et 80 000 hectolitres sont produits et de 10 à 12 millions de bouteilles sont mises sur le marché, ce qui est loin d’être négligeable.
Situé entre Loire et Bordelais, le vignoble charentais est un territoire de liberté qui conjugue le meilleur des deux aires. Le climat océanique tempéré et le fort taux d’ensoleillement offrent des conditions favorables à la culture de la vigne. Les sols sont de type argilo-calcaires, avec un côté plus sablonneux sur le littoral et les îles. Difficile de donner un profil type aux vins tant les terroirs sont différents, mais ils font en général preuve d’une certaine fraîcheur, avec pas mal de fruit. Un vrai atout à l’heure du réchauffement climatique.
Signe des temps, une Maison des Vins IGP Charentais devrait voir le jour en 2023 à… Cognac. Le cépage ugni-blanc, omniprésent dans l’élaboration du cognac, va également être banni de l’IGP vins charentais, histoire d’éviter le mélange des genres. À l’inverse, les vignerons s’autorisent aussi à vinifier des cépages exogènes, comme le pinot noir bourguignon par exemple.
L’offre œnotouristique, encore relativement limitée en dehors des îles, est en cours de développement. En parallèle, les domaines sont de plus en plus nombreux à jouir de certifications environnementales comme celui de François Jobit. De son côté, Jonathan Guillon a fait le pari de produire des vins charentais de qualité sur la presqu’île d’Arvert. En Sud Charente, Le Petit Cousinaud profite de sols limono-sableux pour produire des crus originaux, notamment un rosé que les bons restaurants s’arrachent. Bref, l’IGP a de l’avenir !
La visite de la cave permet de découvrir des chais modernes et de déguster tous les vins produits ici : des blancs secs et fruités, des rosés charmeurs et des rouges légers, avec une gamme complète en bio. Dégustations, apéritifs gourmands accompagnés de produits locaux, balades dans les vignes à vélo ou à cheval permettront aux visiteurs de passer un bon moment et d’en apprendre davantage sur les vins rhétais. Ils profiteront aussi de paysages viticoles séduisants, avec la mer en toile de fond.
Escale à Oléron, île viticole
À quelques encablures de La Rochelle, l’île d’Oléron est l’autre île charentaise productrice de vin. Labellisé « Vignobles et découvertes », son vignoble insulaire couvre à peu près 800 hectares. Disons-le franchement : ici la vedette, c’est le blanc ! Même si les vins des autres couleurs se révèlent tout aussi intéressants. Les cépages sauvignon et colombard sont les plus présents, apportant fraîcheur et notes de fruits ou d’agrumes. Les vins blancs oléronais accompagnent à merveille les huîtres de l’AOC Marennes-Oléron, mais pas uniquement ! Outre la cave coopérative, on peut citer les vignobles Favre & Fils ou Coulon, qui depuis quelques années collectionnent les récompenses dans les concours. La plupart des domaines de l’île sont ouverts aux visites, proposant d’intéressantes activités.
Existant depuis 1965, l’appellation Fiefs Vendéens est reconnue en AOC depuis 2011. Elle se compose de 5 terroirs (ou fiefs) : Vix, Pissotte, Mareuil, Chantonnay et Brem. Grâce à la présence de sols très différents et de climats plus ou moins marqués, les terroirs se révèlent riches et variés. Vix, situé sur un îlot calcaire aux portes du Marais Poitevin, produit de grands vins rouges, puissants, généreux et élégants. Proche du joli village de Vouvant, Pissotte est marqué par son sol argilo-siliceux. À Mareuil, les rouges et rosés sont reconnus pour leur caractère. À Brem, à côté de l’océan Atlantique, on produit des blancs secs ainsi que des rosés ou rouges charmeurs. L’influence maritime est patente, avec une minéralité et une salinité prégnante. À Chantonnay, on se trouve carrément sur une faille carbonifère : les blancs sont tendus et généreux, les rouges puissants et complexes.
Chaque vigneron imprime toutefois sa marque. On en compte 15 sur l’appellation Fiefs Vendéens, qui cultivent environ 420 hectares de vignes. Petite originalité, ils produisent près de 40 % de rosé. Sur le plan environnemental, le vignoble est déjà très avancé, avec un fort taux de certification (HVE, bio ou Demeter).
Les vins blancs sont vinifiés en majorité avec les cépages chenin et chardonnay. Leur robe est chatoyante et leur nez riche, minéral ou floral, avec des notes salines ou iodées et une finale légèrement grasse (notamment pour les chardonnays). Les vins rouges et rosés sont vinifiés avec du pinot noir, du gamay, du cabernet franc, du cabernet sauvignon et de la négrette. Ces rouges font preuve d’une belle finesse, avec des tannins soyeux et souples, et une finale croquante. Quant aux rosés, leur bouche est vive et légère, parfois charnue. Des compagnons parfaits pour l’été !
Il existe une Route des vins qui sillonne les 5 Fiefs vendéens à la rencontre des 15 producteurs présents dans l’AOC. L’occasion de profiter de nombreuses activités œnotouristiques comme des dégustations, des visites de chais et de caves, des balades dans les vignobles, etc. Citons par exemple les Vignobles Mourat, où l’offre œnotouristique est large et ludique, à l’image de leur bistrot estival avec food truck. Chez Mercier, les visites privées à thème sont aussi passionnantes que pointues. De son côté, le château de Rosnay organise de gourmands marchés de producteurs. Autant d’exemples de la vitalité de l’AOC Fiefs Vendéens.
Auteur : ©Jean Tiffon